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Extrait des chroniques de Henri Venel
fondateur à Orbe de l'institution de l'Hôpital puis à Genève l'institution de Champel.


Cette chronique est très intéressante puisqu'elle relate les premiers éléments de l'activité de Frédéric Edouard Sillig à son arrivée en Suisse. Hormis les retraits de début de paragraphe, l'otthographe (y compris les fautes) et la ponctuation originale ont été strictement maintenues.
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lNSTlTUTl0N DE CHAMPEL
Dès juillet 1832 et en 1833 - 1834 et 1835.


Les deux mobiliers Venel et Pictet durent être bien étonnés de se trouver ensemble. Moi-même je l'étais de me lancer dans une pareille entreprise, à mon âge; mais les vieillards ne plantent pas les arbres pour eux, mais pour leurs enfants et leurs descendants.
Je ne veux être, en toute réalité, que le fondateur de Champel, l'organisateur.
A fin 1832 nous avions déjà une trentaine d'élèves et il fallait augmenter le nombre des maîtres auxiliaires et spécialistes.. La prospérité de ce magnifique Champel fut si rapide que, pour ne pas être accablé, je dois me borner à en offrir qu'un tableau très succinct.
Deux intéressants auxiliaires m'avaient été offerts beaucoup plus tôt; mais sous des circonstances moins favorables. Mr. Challet, dès nos premiers commencements à Champel, par Mr. Caton Nourrisson. Mais que faire alors d'un maître de 20 ans ? Allais-je recommencer les embarras Alexis ? Je refusai. Mr. Challet s'en fut fonder quelque chose, puis nous revint deux ans plus tard.
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Mr. Olivier, aussi, mais par l'entremise des demoiselles Mallet, de Ferney; lesquelles avaient écrit à Madame Turtaz de la Roquette (de Chapeaurougel) laquelle m'avait député son mari et Benjamin. Je refusai, le temps n'était pas venu, l'heure n'avait pas sonné.
Il avait fallu, pour mon cher Challet une recommandation plus puissante. Mr. Chenevière était intervenu par son ami Mirabaud. C'est ce que le bon Mr. Chenevière a rappelé plus tard en nous proposant Mr. Ducheilard. La négociation ne fut pas longue.
Dès février j'avais dédit Lagier, puis Wolfer, qui prenaient trop d'ascendant sur Sillig.
L'ouverture Challet eut lieu le 1er. mars 1834. Le 2, je reçus à Champel, la visite du jeune et élégant Mr.Challet et tout était couché. Le 17 il était installé.
Charles NodIer, de Paris, notre 130ème élève était entré dans cet intervalle.
L'ouverture Olivier introduit par Mr. Lavit en notre absence, eut lieu le 27 juin 1834.
Notre retour à Champel s'est fait le 6 juillet et déjà le 7, Mr. Lavit nous ramenait son jeune Français, d'Antibes, âgé alors de 25 ans, élève de l'École polytechnique. Le lendemain 8 juillet je le revoyais et le 9 tout était terminé.
J'ai parlé a notre absence. Il s'agissait d'un petit voyage que nous avions fait, en famille seulement, pour compléter la convalescence de ma bien aimée; après son séjour à Mornex, avec Antoinette, du 1er. mai au 16 juin.
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Nous avons ait un petit tour, dans le Pays, pour visiter tous nos parents et amis de Lausanne, Moudon, par Fribourg et Neuchâtel et retour par Provence et St. Aubin, etc. 
Les élèves, eux, sous la conduite de Sillig, sont allés en voyage de vacances, du 7 au 22 juillet 1834, à Cluse et Chamonix. Rahn est parti le 20 juillet pour l'Italie.
La relation et presque l'intimité Bonaparte est certes l'événement le plus étrange de notre vie et la plus inattendue de ce 1er.Champel
Cette relation nous devenait intéressante, en proportion de ce qu'ils étaient persécutés et malheureux.

Le Colonel Dufour les porte dans son cœur. Les Daulte leur sont dévoués. La princesse Galitzine les chérit et les vénère, dans l'espèce de proscription qui pèse sur eux.
Nul oreiller où ils puissent longtemps et paisiblement reposer leur tête même à Genève. 
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Un vent de prospérité inespéré, inouï, fabuleux, dangereux, s'amorce peut-être. Mais attention, iI y a trois choses qui perdent l'homme rapidement: la prospérité, la présomption et la flatterie.
Qu'on en juge de cette prospérité par les visites de la dernière semaine de juin: Visite des Briggs, visite de Dufour pour Napoléon, visite de la princesse Bacciochi; visite du comte Walewski, pour le prince Czartoriski; visite Lasalle, pour deux élèves; visite de la princesse Galitzine, etc. 

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Le 4 septembre Sophie est reçue à la Communion. Le 25 les élèves font un petit voyage de vacances dans le Jura; par Gimel, Le Brassus, le Mont-Tendre, Vallorbe et Orbe. 
Le 21 octobre nous avons la visite de la princesse Galitzine avec le duc de Montebello. 
Pour mes 54 ans ce fut une vraie fête. Nous fumes souper au Bois de la Bâtie, puis tous au Théâtre. C'était vouloir faire sensation. On éblouissait !
Dans cette prospérité, j'avais jugé à propos d'augmenter les habitations d'élèves, aux dépens des dépendances agricoles. C'était, peut-être, une imprudence, après de si grands sacrifices; c'était peut-être une réussite. Sillig me décourageait, Pictet au contraire. Nous eûmes un dortoir plus vaste et plus sain que celui tourné au midi et, de plus, des chambres pour malades, jouissant aussi de l'air du nord. Ces dernières constructions furent terminées à cette époque. 
Nous eûmes, le 31 décembre, notre concert avec bal et souper, et, le soir du 1er. janvier 1835, à la Comédie, deux grandes loges pour 39 personnes. Quel éclat !
Pour les 20 ans d'Antoinette, le 17 février, nous jouons: « L'Ours et le Pacha. »
Duchaillard organise, dans une cuisine, son laboratoire de chimie.
Le 15 mars nous avons, à Champel, la visite de la Reine Hortense.
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Cette prospérité ne doit pas nous aveugler. Il ne manque pas, autour de nous, des rivaux haineux et moqueurs. Je me rends compte de l'état d'esprit déprimant qui règne.

Sillig n'est plus le même. Nous cheminons, l'un et l'autre, dans un chemin clair-obscur qui, à force de délicatesse, n'est ni de la franchise, ni du mensonge. Il semble circonvenu, flatté, exalté par d'autres. Qu'en pensent Challet et Olivier, simples observateurs de ce mouvement de famille? 
Pendant ce temps nous avons à Champel, le 28 mars, le "Grand Bal" donné par les élèves. La reine Hortense refuse. Le prince Louis, futur Président de la République, accepte et danse. napoleon3.jpg
Le 5 avril visite de la reine Hortense pour s'excuser et remercier.
Noua faisons une visite au très haut et puissant seigneur genevois Mr. Sauter. Le 13 juin à la princesse Camerata. Le 19 soirée à Ferney, Mme. de Budé, les Mallet. Le 21 dîner à Bellevue, chez la princesse Camerata.
Le 22 juin, à l'examen oral no. 1, la comtesse de Riancourt est introduite. Les examens se terminent le 27 juin par une grande fête.
Viennent ensuite les vacances pendant lesquelles Sillig, Challetet Olivier vont être, du 29 juin au 4 août, les chefs d'un voyage par le Tyrol et jusqu'à Venise.
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Les émoluments de Sillig sont portés à frs. 2000.-, dès le 30 juin. 
Le 9 août nous assistons à la fête de l'Oiseau, à Ferney; brillante soirée de Budé. 
Pendant ce temps, grand jour, le 19 août, Edouard Olivier nous déclare, par lettre, son amour pour Sophie. Cette petite cachotière donnera son oui définitif quelques jours plus tard. (1er. sept.).
Le 25 août, le lendemain du Jubilé de st. Pierre, avec illumination, nous avons la première visite du roi Jérôme.
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Le 1er. septembre, visite de Mr. Henri Mayer, gouverneur du jeune prince de Montfort. Le 4, 1ère. visite de la princesse de Montfort (ex-reine de Westphalie). Le 8, visite Pictet, le prince accepte, le 10 dédite Mayer par Ph. Fazy; le même jour visite Mayer et Fazy, ils couchent le refus; mais le 15 visite du roi Jerôme, l'affaire reprend. Le 21 visite du gouverneur Mayer avec le jeune prince. Le 27 novembre visite du gouverneur; enfin le 28 c'est la résolution définitive. 

Le 29 septembre, Napoléon de Montfort, 2ème. fils de l'ex roi Jérôme, entre à l'Institut comme élève. C'est le No. 166.
Le 30, scènes Würtembergeoises: à l'occasion de la St. Jérome. Visite du roi qui reste à déjeûner. Le soir visite de la reine.
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Le 3 octobre nous avons la dernière visite de la famille de Montfort. (Mathilde future princesse Demidoff).
Le 5 mes trois filles vont faire un séjour à Orbe. Le 16, voyage impromptu. Sur le lac une bise affreuse nous oblige à prendre des voitures. Montfort va à Lausanne; Olivier et moi allons à Orbe. Sillig et les élèves vont à Cossonay. Le lendemain je revois Sillig à Romainmotier. Il est maussade. Nous tournons la Dent de Vaulion, Le Pont, Vallorbe, Orbe. Le 18 au Saut du Day, à la Tuffière. A l'occasion de la fête de Sillig, grand dîner à la Maison de Ville; Bal. Le sort en est jeté, c'est sans retour. Sillig m'échappe. Le 19 nous rentrons à Champel par Morges et le lac.
Le 30 novembre la princesse de Montfort meurt à Lausanne. Le 4 décembre, le prince nous revient, pour nous quitter définitivement le 15.

Édité le 12.06.2012

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